Barrage de Sivens : un projet exemplaire du mépris de la Préfète envers les experts et les citoyens

21/05/2014 13:25

Gaillac, 20 mai 2014

 

 

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

                                               Barrage de Sivens : un projet exemplaire

du mépris de la Préfète envers les experts et les citoyens

 

A l’occasion de l’expulsion, le 16 mai dernier, des militants du Collectif « Tant qu’il y aura des bouilles » par des moyens policiers démesurés, la Préfète du Tarn a déclaré que le barrage de Sivens est un « projet environnemental exemplaire ». Et d’argumenter ensuite que « des inventaires précis ont été réalisés », que « l’évaluation des effets du projet sur les espèces protégées a été faite », que « des mesures de nature à garantir le maintien de l’état de conservation des espèces protégées » ont été prises, que « 19 hectares de zones humides seront reconstituées » comme mesure de compensation…

Est-ce à dire que les scientifiques du Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel (CSRPN) et les experts du Conseil National de Protection de la Nature (CNPN), nommés par l’Etat, n’y comprennent rien à la conservation des espèces protégées ? Car, contrairement à la Préfète, ils affirment que « les inventaires faunistiques sont très insuffisants », que « l’analyse des impacts du projet sur la faune et le maintien des connectivités écologiques sont sous évalués », que « les mesures d’évitement, de réduction ou de compensation sont insuffisantes, irréalisables, inadéquates ou très hypothétiques ». Ce qui les a conduit à donner des avis défavorables à la destruction de la zone humide du Testet (CSRPN en décembre 2012 et CNPN en avril et en septembre 2013). Les propos de la Préfète, infondés scientifiquement, seraient-ils plus légitimes que les rapports d’analyses sur les espèces protégées effectués par des experts scientifiques reconnus ?

Si la Préfète méprise ainsi l’avis des scientifiques, relaie-t-elle au moins l’avis des services de l’Etat ? Pas celui de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA) qui a souligné que « les mesures de correction et de compensation envisagées ne garantissent pas le maintien en bon état de conservation de l’ensemble des groupes d’espèces précités et impactés par le projet ». L’ONEMA considère aussi que « le maintien du bon état chimique et écologique de l'eau en aval immédiat de la retenue ne semble pas garanti ». Ce qui est bien dommage pour un « projet environnemental exemplaire »…

Si ce projet est bien exemplaire, c’est sur le déni de démocratie. Parmi les trois pages d’exemples précis déjà publiés, citons le rapport fondateur du projet (CACG 2001) qui a été caché au public lors des enquêtes publiques. Ou encore le mépris pour tous les citoyens qui ont participé aux enquêtes publiques quand la Préfète ne respecte pas l’avis de la Commission d’enquêtes publiques qui conditionne les déclarations d’intérêt général et d’utilité publique à l’avis favorable du CNPN. Est-ce aussi digne d’un Etat exemplaire que la Préfète ne réponde plus aux courriers du Collectif depuis octobre 2013 ou bien que la Direction départementale des territoires (DDT) mente ouvertement sur les objectifs du projet ?

Dans ces conditions, comment s’étonner que des personnes dégoutées par cette attitude méprisante envers les citoyens s’engagent dans des occupations illégales du site pour faire entendre la légitimité de leur position ? Devraient-ils se tourner vers la justice pour empêcher le projet qu’ils contestent ? Au regard de l’expérience, ils en doutent car plusieurs barrages construits par la CACG ont été condamnés de nullité après leur construction du fait que la justice avance moins vite que les bulldozers. Il en est ainsi du barrage de Gabas (dans les dept. 64 et 65) et, plus proche de nous, de celui de Fourogue construit en 1998 sur le bassin de la Vère pour le Conseil Général du Tarn et qui a été déclaré illégal en 1999.

Alors que le Tribunal administratif de Toulouse et le Conseil d’Etat ont rejeté le référé suspensif contre le barrage de Sivens sans argumentation juridique, il est probable que les juges qui se prononceront, dans 2 ou 3 ans, sur le fond du projet (son utilité publique, son intérêt général…) annulent un ou plusieurs des 3 arrêtés préfectoraux que le Collectif et ses partenaires ont attaqués. Mais gagner au tribunal contre un projet déjà construit et qui ne sera pas démoli est une victoire à la Pyrrhus que veulent éviter de plus en plus de militants écologistes échaudés…  

Ce qui pourrait empêcher de nouvelles occupations illégales, ce qui serait vraiment exemplaire, ce serait que la Préfète du Tarn favorise l’abandon du projet de barrage de Sivens pour agir en cohérence avec le beau discours du Président de la République à l'occasion de la Conférence environnementale en septembre 2012 : « Préserver la biodiversité, c'est limiter l'artificialisation des sols, c'est encourager le développement d'un nouveau modèle agricole, plus respectueux de l'environnement qui réduise l'usage des pesticides, protège les ressources en eau »…

Contacts presse : Ben Lefetey (0699266066) & Françoise Blandel (0602319690)