La reconstruction de l'histoire climatique de la Terre révèle l'ampleur du réchauffement climatique

30/03/2013 23:00

La reconstruction de l'histoire climatique de la Terre révèle l'ampleur du réchauffement climatique

 

carotte_glace_Antarctique_OSUDes scientifiques scrutent une carotte de glace prélevée dans leur site de forage en Antarctique Ouest
Les données issues des 73 sites d'observations des glaces et des sédiments de par le monde ont permis aux scientifiques de remonter l'histoire des températures terrestres jusqu'à la fin de la dernière ère glaciaire. Les résultats des analyses montrent que notre planète est aujourd'hui plus chaude qu'elle ne l'a été pendant 70 à 80 % de ces 11 300 dernières années.

Le principal auteur de l'article, Shaun Marcott, de l'Université de l'oregon (OSU) note que les précédentes recherches sur la paléoclimatologie de notre planète se sont majoritairement limitées aux deux derniers millénaires. Le fait d'étendre l'exercice de reconstruction des températures du globe sur une période qui remonte à la fin du dernier âge de glace permet de replacer notre climat actuel dans un contexte plus large.

Ceci a été possible en analysant des carottes de sédiments fossiles océaniques et des archives terrestres. Les caractéristiques chimiques et physiques des fossiles, dont les espèces retrouvées, leur composition chimique et leur rapport isotopique fournissent des données fiables de reconstitution des températures passées.

"Nous savions déjà que la Terre d'aujourd'hui est plus chaude que jamais, à de rares exceptions près, depuis 2 000 ans," note le Pr Marcott. "Mais nous avons désormais la certitude qu'elle est également plus chaude qu'elle ne l'a jamais été, toujours à de rares exceptions près, depuis 11 300 ans."

"Le siècle dernier ressort comme une anomalie dans les relevés de température de la Terre depuis la fin du dernier âge de glace," explique Candace Major, directrice au sein de la Division des sciences océaniques du programme de la National Science Foundation (NSF), qui a participé au financement de cette étude.

"Nos mesures montrent que l'ampleur du changement climatique enregistré depuis le début de la révolution industrielle équivaut à celui intervenu sur toute la période précédente de 11 000 ans," note le Pr Major, "c'est donc une accélération phénoménale du changement."

Le sujet de préoccupation est que d'ici 2100, le réchauffement sera tel que les températures dépasseront tout ce qui a été enregistré sur la période de 11 300 ans (appelée l'Holocène). Ces prévisions sont basées sur les modèles climatiques validés par l'Intergovernmental Panel On Climate Change (IPCC ou GIEC en français) et sur les scénarios plausibles d'émission de gaz à effet de serre.

Pour Peter Clark, paléoclimatologue de l'OSU et co-auteur de l'article paru dans le magazine « Science », les précédentes reconstructions de températures étaient locales et extraites de leur contexte global.

"Si vous limitez le périmètre géographique à une seule région, les relevés de température sur une période donnée peuvent être influencés par des processus climatiques locaux comme El Niño ou la mousson," ajoute le Pr Clark. "En agrégeant les données issues de sites répartis dans le monde entier on lisse ces anomalies locales et l'évolution des températures du globale sur longue période se dégage nettement." ajoute-t-il.

Selon le travail de reconstitution des chercheurs, la Terre s'est rafraîchie en moyenne de 0,8°C en 5 000 ans, mais, depuis le siècle dernier, elle s'est réchauffée également de 0,8°C. L'évolution la plus marquée est intervenue dans l'hémisphère nord, où la masse continentale et la population humaine sont plus importantes que dans l'hémisphère sud.

Vers un réchauffement inédit depuis la dernière ère glaciaire

"Le plus inquiétant," ajoute le Pr Clark, "est que ce réchauffement sera d'une ampleur jamais atteinte depuis 11 300 ans." En effet, les modèles climatiques compilés par le GIEC en 2007 estiment que les températures devraient continuer d'augmenter dans une fourchette comprise entre 1,1 à 6,4°C d'ici la fin du siècle, en fonction notamment de l'importance des émissions de dioxyde de carbone par les activités humaines.

Pour le Pr Marcott, l'un des facteurs naturels affectant le niveau global des températures depuis 11 300 ans est l'évolution graduelle de la distribution de la chaleur solaire liée à l'inclinaison de la Terre par rapport au soleil. "Durant la période la plus chaude de l'Holocène, la position de la Terre était telle que les étés dans l'hémisphère nord étaient plus chauds," précise le Pr Marcott. "Avec le changement de cette orientation, les étés dans l'hémisphère nord se sont refroidis, et nous devrions encore être aujourd'hui dans cette longue période de refroidissement, ce qui n'est pas le cas", ajoute-t-il. En effet, l'excentricité de l'orbite terrestre fait que la Terre se trouve actuellement la plus éloignée du Soleil en juillet, au moment de l'été dans l'hémisphère nord.

"Le climat terrestre est complexe et reflète de multiples facteurs, comme les émissions de dioxyde de carbone et le rayonnement solaire," indique le Pr Marcott. "Ces deux variables ont évolué très lentement pendant plus de 11 000 ans mais depuis un siècle l'augmentation des émissions de CO2 due aux activités  humaines est importante. C'est bien la seule variable qui peut expliquer l'augmentation rapide des températures dans le monde," conclut-il.

Source

Earth Is Warmer Today Than During 70 to 80 Percent of the Past 11,300 Years - NSF
Traduction pour notre-planete.info : Michelle Vuillerot

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